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Billet de blog 4 septembre 2022

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Le climat change mais les temps ne changent pas

Dans les pays riches, qui sont pour la plupart situés en zone tempérée, la vie des populations n’est pas pour l’instant fondamentalement bouleversée par la crise écologique. Les catastrophes liées au dérèglement climatique sont encore des accidents qui arrivent aux autres, à ceux qui sont loin ou aux malchanceux.

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La crise écologique s’invite de plus en plus souvent dans l’actualité, elle est désormais évidente, elle frappe déjà durement et elle va s’intensifier. Le changement de climat qui est une des composantes de cette crise produit des effets spectaculaires, largement médiatisés, qui entraînent une prise de conscience : une étude de l’OCDE, menée en juin, donc avant les événements climatiques de l’été, montre que quatre Français sur cinq estiment qu’il s’agit d’un problème grave nécessitant des mesures. Mais, ni l’urgence, ni la radicalité des mesures ne font consensus.

Dans les pays riches, qui sont pour la plupart situés en zone tempérée, la vie des populations n’est pas pour l’instant fondamentalement bouleversée ; les secousses du climat sont de plus en plus violentes et rapprochées mais elles n’affectent encore qu’un nombre limité de personnes à la différence de pays comme le Pakistan où les inondations récentes ont provoqué la submersion d’un tiers du territoire, plus de 1200 morts, et le déplacement de 50 millions d’habitants, devenus des sans-abri !  

Cet été, en France, des dizaines de milliers d’ha ont brûlé, des communes ont manqué d’eau, des orages de grêle ont dévasté des toitures, mais, globalement, la vie a suivi son cours normal avec des plaisanciers sur les plages, des bouchons sur les routes, le Président à Brégançon sur son jet-ski. .   La nature a certes terriblement souffert et elle souffre encore mais l’automne arrive et bientôt l’hiver.  Alors, après tout, ce n’est pas si grave . . . 

Les catastrophes liées au dérèglement climatique sont encore des accidents qui arrivent aux autres, à ceux qui sont loin ou aux malchanceux. 

Notre mode de vie et notre système économique ne sont pas remis en cause, l’effondrement n’est pas une perspective. 

Le gouvernement, confronté à la hausse du coût de l’énergie, parle de sobriété mais il ne s’agit nullement d’une sobriété telle que la réclament les écologistes  et il l'organise à sa façon. Le conseil de défense énergétique présidé par Emmanuel Macron prendra, n’en doutons pas, les dispositions nécessaires afin d’éviter que cette sobriété ne compromette  les profits et n’affecte trop les comportements des acteurs dominants de la vie économique. Elisabeth Borne est allée parler de cette sobriété sélective à l’université du MEDEF ( comme chaque année, nos dirigeants politiques vont y puiser  leur inspiration). Elle a tenu à rassurer les patrons : « Nous avons pris un engagement ferme : pas de hausse d’impôts. Cet engagement, nous nous y tenons, sans céder aux sirènes du populisme. ». En pleine crise climatique, on aurait pu espérer que le gouvernement se décide à taxer par exemple certains modes de déplacement particulièrement polluants. Il n’en est pas question, la fiscalité ne sera pas utilisée pour limiter ou dissuader les déplacements en jet privé mais le stationnement devient payant pour les scooters à Paris.  Comme d’habitude, ce sont les plus fragiles qui  subiront les effets de l’austérité qui s’annonce, la fin de l’abondance pour celles et ceux qui ne l’ont jamais connue est sans doute moins douloureuse !  Ce sont aussi les populations les plus pauvres qui subiront le plus durement  les effets de la crise climatique car ils n’auront pas les moyens de s’y adapter. Les fonds alloués à la rénovation énergétique des logements sont notoirement insuffisants  et avant la hausse du coût de l’énergie, en 2020, 10,5 % des Français, parmi les plus modestes, dépensaient déjà plus de 8 % de leurs revenus pour payer les factures énergétiques de leur logement. 

Mais, avant tout, comme le réclame Geoffroy Roux de Bézieux, le patron des patrons,“ne faisons pas des riches les boucs émissaires de la crise climatique” !!  

Le président du MEDEF peut être tranquille :  entre le maintien du monde capitaliste, inégalitaire et destructeur, et la sauvegarde de la planète, la bande à Macron opte  clairement pour le statu quo. Quand le  ministre de l'économie Bruno Le Maire ose déclarer que “ taxer plus, c’est produire moins” et que “ les super profits, je ne sais pas ce que c’est”, il faut se rendre à l’évidence : il n’y aura jamais de véritable transition écologique dans une société  de croissance dirigée par de tels voyous et régie par un capitalisme financier mondialisé. Dans ce système, les destructeurs de l’environnement ne sont jamais punis mais au contraire récompensés et cités en exemple.  

Notre environnement de pays riche se détériore rapidement mais il reste encore vivable, notamment pour les plus favorisés et il n’est donc pas question d’organiser une vraie sobriété qui signifierait de décroître dans certains domaines, d’éviter de produire tout et n’importe quoi, de renoncer par exemple au déploiement de la 5G, et donc de remettre en cause la rentabilité de certains secteurs de l’économie. 

Dans l’immédiat, entre deux catastrophes climatiques, les fondamentaux restent les mêmes, les pauvres pensent à leur fin de mois, les riches pensent à leur week-end et à la façon de dépenser leur argent. Tous  les êtres vivants qui souffrent de la dégradation de l’environnement - et qui pour certains sont en voie de disparition - ne peuvent compter que sur la bienveillance du marché pour survivre. Et  le marché n’est pas spécialement bienveillant. . .

Le climat change mais, pour l’instant, les temps ne changent pas.

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