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Billet de blog 18 avril 2022

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Le troisième tour est déjà là

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 Encore une fois, l’élection présidentielle que l’on présente volontiers comme l’événement structurant toute notre vie politique est en passe de sacraliser un pouvoir illégitime représenté par un chef de l’Etat honni par une majorité de citoyens. Le piège s’est refermé sur plus de 70 % des électeurs du premier tour qui attendent maintenant, impuissants, comme des animaux en cage, la punition, le châtiment définitif du 24 avril avec très probablement la réélection d’Emmanuel Macron. La popularisation des thèses de l’extrême droite par les médias dominants et par le  gouvernement lui-même (songeons par exemple à Gérald Darmanin et Jean-Michel Blanquer) ont abouti finalement, malgré le très bon score réalisé par la France insoumise, à la désignation de la rivale espérée pour le second tour par toute la clique macroniste. La corde tressée depuis de longues années avec beaucoup de constance et d’obstination pour ligoter le peuple et lui imposer l’option néolibérale face à la menace du Rassemblement national est certes sacrément usée, mais elle devrait encore remplir son office. Pour le second tour de scrutin, le vote de gauche est une nouvelle fois largement préempté afin de faire barrage à l’accession au pouvoir de Marine Le Pen, même si “les castors” commencent à renâcler à la tâche.  

Mais, à trop jouer avec le feu on peut finir par se brûler et l’épilogue de ce rendez-vous électoral n’est pas totalement assuré. Alors, entre les deux tours, le candidat Macron adapte sa communication, envisage une “méthode nouvelle” pour gouverner :  il va maintenant mieux tenir compte de l’avis des Français, il parle d’un “avenir en commun” et d’un nouveau paradigme pour un quinquennat “qui sera écologique ou ne sera pas”, évoque le recours éventuel au référendum pour sa réforme annoncée des retraites, promet un Premier ministre en charge de la planification écologique, etc. Le moulin à promesses tourne à plein régime.  En une semaine Jupiter a opéré sa mue, il est maintenant tout en souplesse et en empathie,  il ne menace plus ses opposants de la foudre de ses flash-balls mais veut les associer à son nouveau projet et fait sienne leurs idées, il est en phase avec la jeunesse, comprend ses craintes, son anxiété, et lui offre sa protection et son engagement. Un grand démocrate, soucieux de préserver les valeurs républicaines et “d’organiser la transition environnementale dans chaque territoire”, connu pour sa bienveillance et son refus de toute violence, est désormais en scène pour lutter contre l’inacceptable et barrer la route à celle qui fait partie du clan des climato-sceptiques et “n’est pas la douceur incarnée”. Quand les bornes de l’indécence et du cynisme sont franchies. . .

Emmanuel Macron, candidat, est aussi le Président et  le favori des médias, il peut donc tout oser, tout se permettre sans crainte d’être contesté, il peut réenchanter le monde dévasté par son premier mandat. 

Malgré tous ces efforts, le second tour sera avant tout un vote du refus, un choix par défaut, il ne prendra pas  des allures de plébiscite.

Après le lamentable épisode de la Convention citoyenne sur le climat, après toutes les promesses reniées du quinquennat, personne ne peut être dupe : le programme du président des riches ne changera pas, la start-up nation est lancée depuis longtemps et  il faut continuer à  mettre en oeuvre le business plan, désormais maquillé en vert,  élaboré par ceux qui détruisent la planète, saccagent les services publics et les acquis sociaux, en bref exploitent sans vergogne l’homme et la nature. 

Il n’y aura évidemment pas de solution à la crise écologique et sociale sous le règne de Macron II

Le peuple espérait reprendre espoir, redresser la tête, il va lui falloir courber encore davantage l’échine et travailler plus.  En perspective, toujours plus d’efforts pour toujours plus d’inégalités. . . L’annonce lors de l’assemblée générale du groupe Stellantis (issu de la fusion entre PSA et Fiat Chrysler) de la rémunération astronomique de plusieurs dizaines de millions d’euros de son directeur général Carlos Tavares résonne comme un coup de canon du marché pour saluer le quinquennat à venir. 

Ces gens-là sont décidément sans retenue ! Les vies humaines doivent être entièrement consacrées à nourrir leurs profits. Dans un monde où les conditions de vie se dégradent à grande vitesse avec le dérèglement climatique, la pollution chimique et plastique généralisée, la chute de la biodiversité, etc, programmer un recul de l’âge légal de départ à la retraite, soit-disant justifié par le fait que l’on vit plus longtemps, est une aberration intellectuelle et une provocation intolérable. L’espérance de vie en bonne santé diminue déjà et une étude récente de l’INSERM met en évidence “une augmentation significative du taux de mortalité infantile en France ces dernières années” (Lire ici).

Dans “l’ économie plus écologique”  d’Emmanuel Macron, il n’est question ni de rompre avec la croissance ni avec le capitalisme financier. Les impératifs de  rentabilité du capital condamnent les travailleurs à subir encore toute une litanie de réformes et de décisions contraires à leurs  intérêts les plus élémentaires. La machine à fabriquer du mécontentement, de la révolte, des manifestations de rue, des éborgnés, des mutilés, des matraqués, va se remettre en branle. 

Mais, cette fois, il est bien possible que toute cette pantomime ait trop brutalisé les consciences. C’est sans doute l’élection présidentielle de trop. Le peuple a compris que, dans le système actuel,  le vote lui-même organise sa soumission et la faillite de la démocratie.  Voter la rage au ventre, voter en pure protestation et désespérance,  ne peut apporter aucune solution. La Vè République est probablement en train d’expirer. 

Le troisième tour s’invite déjà, les étudiants ont manifesté la semaine dernière, à l’issue du premier tour,  leur désillusion et leur colère en occupant certaines universités. Nul doute que d’autres mouvements suivront.  

Macron sera sans doute réélu mais la jeunesse a déjà fait sécession. Il lui reste à mettre en oeuvre des formes de résistance capables de faire définitivement céder et s’écrouler le vieux monde d’Emmanuel Macron. 

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